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Ce que j’espère pour mon enfant: Qu’il soit docteur!

19 juin 2019 L'Economiste

Pour la majorité des familles marocaines, l’éducation des enfants figure en tête des préoccupations. Mais leurs attentes et leurs perceptions de l’école restent encore peu étudiées à travers des enquêtes de terrain. Un tel travail pourrait appréhender d’une manière objective les divers aspects de la relation «famille-éducation».

C’est l’objectif de l’enquête réalisée par l’Instance nationale de l’évaluation (INE), relevant du Conseil supérieur de l’éducation, de la formation et de la recherche scientifique (CSEFRS). Les premiers résultats de cette étude ont été dévoilés lors d’une rencontre d’information organisée dernièrement par le Conseil. Dans ce travail, la relation ménage-éducation a été examinée à travers différents aspects, à commencer par celui des attentes et aspirations.

Pour que les élèves réussissent, plus de 80% des ménages interrogés recommandent un accompagnement au profit des enfants présentant des difficultés scolaires, à travers un soutien renforcé. La diversification des possibilités d’orientation (scolaire et professionnelle) est aussi proposée par plus de 20% d’entre eux.

Du côté des parents, les aspirations restent naturellement toujours optimistes sur le niveau d’éducation espéré pour les enfants. Ainsi, la majorité écrasante, près de 90%, souhaite à sa progéniture une situation sociale meilleure que la sienne. Un niveau d’éducation très élevé est visé, avec 42,4% pour le doctorat et 32% pour la licence.

Les ambitions des familles rurales restent très modestes par rapport à celles des ménages urbains. Seulement 23% parmi elles espèrent pour ses enfants un doctorat, contre plus de 50% pour les citadins. L’effet genre est presque neutralisé du fait qu’une très large majorité (92,4%) considère que l’école est importante aussi bien pour les garçons que pour les filles. Mais une fois l’on passe aux métiers souhaités, la nuance devient plus claire. Ainsi pour les filles, on constate une nette tendance vers les professions libérales (médecin, ingénieur, avocat…) et le métier d’enseignante, avec des parts respectives de 35% et 23,9%.

Les professions dans le secteur public continuent à être privilégiées, mais avec moins de poids que pour les garçons. Pour ces derniers, les professions les plus souvent citées (26,2%) relèvent surtout de catégories hétérogènes de professions libérales (médecin, avocat, ingénieur…) et de postes dans le secteur public (28,2%). Travailler dans le privé, même en tant que chef d’entreprise, reste minoritaire. Moins de 5% le citent, aussi bien pour les garçons que pour les filles.

Les élèves du privé coûtent 12 fois plus à leurs parents

Une large partie de l’étude a été consacrée au budget mobilisé par les ménages pour l’éducation de leurs enfants. La moyenne des dépenses d’un enfant scolarisé, au titre de l’année scolaire 2017-2018, est estimée à 2.679 DH par ménage, tous cycles d’enseignement confondus. Cette moyenne passe à 11.943 DH dans l’enseignement privé, contre 938 DH dans les établissements publics, soit 12 fois moins.

Par cycles scolaires, le qualifiant arrive en tête avec un coût global annuel de 3.454 DH, suivi par le préscolaire avec 3.100 DH. Plus le revenu augmente, plus la moyenne des dépenses par enfant scolarisé grimpe. Les coûts varient en fonction du milieu et du sexe. Selon l’enquête, les dépenses de scolarisation d’une fille et d’un garçon sont respectivement de 755 DH et de 797 DH en milieu rural, et de 3.241 DH et 4.195 DH en milieu urbain.

En ce qui concerne la contribution aux frais de scolarité à partir du lycée, le niet des familles est confirmé. La majorité, soit 77,6%, sont contre cette participation. Seulement 18,6% y sont favorables. En milieu rural, le taux de refus passe à 83,6%, contre 74,5% en urbain. Pas de grands changements dans cette position même chez les catégories aisées.

Pour les familles contre la contribution, l’école publique doit rester gratuite pour 64,9% d’entre eux. 31,3% ont évoqué le manque de moyens.                                  

20% des jeunes abandonnent leur scolarité sans diplôme

L’enquête du Conseil de l’éducation a couvert un échantillon de 3.000 ménages répartis sur l’ensemble des régions du Maroc (2.000 dans l’urbain et 1.000 dans le rural), soit un total de 12.800 personnes. Elle a permis de collecter des données sur les caractéristiques scolaires des enfants de 3 à 22 ans, ainsi que sur les niveaux de diplômes obtenus par la population âgée de 15 ans et plus. Les résultats dégagés confortent ceux déjà publiés dans les rapports du ministère de tutelle.

A titre d’exemple, 84,1% des élèves âgés de 3 à 22 ans sont scolarisés dans le secteur public contre 15,9% dans le privé. Mais ce dernier domine au niveau du préscolaire et primaire, avec une part de 83,4% qui chute à 11% dans le collège et 6% dans le lycée ou le supérieur.

Le pourcentage des non-scolarisés n’ayant jamais accédé à l’école est beaucoup plus grand chez les jeunes de 18 à 22 ans avec 8,2% contre 4,5% pour la frange d’âge entre 6 et 11 ans. Dans le même registre, l’on retient que 19,8% des jeunes (entre 6 et 22 ans) ont abandonné l’école sans obtenir de diplôme ou de certification. Cette déscolarisation est expliquée par les ménages par l’échec de leurs enfants aux examens, ainsi que par leur faible revenu.

L’enquête confirme que les membres des ménages résidant dans le milieu rural obtiennent moins de diplômes que ceux résidant dans le milieu rural. Ainsi, 69,2% des membres du rural, âgés de 15 ans et plus, n’ont pas de diplôme, contre seulement 39,4% en urbain.