Un an après son acquisition par le groupe Saham, la Société Générale Marocaine de Banques s’apprête à tourner une page symbolique de son histoire. La banque s’apprête à changer de dénomination sociale.
Ce tournant symbolise la montée en puissance d’un modèle bancaire national, porteur d’un soft power économique renouvelé au service de l’influence marocaine.
Une Assemblée générale extraordinaire (AGE) est prévue le 24 juin prochain pour entériner le changement de nom de la Société Générale Marocaine de Banques (SGMB), un an après son acquisition par le groupe Saham, dirigé par Moulay Hafid Elalamy.
Ce dernier avait déboursé 745 millions d’euros pour racheter 57,67 % du capital détenu par le groupe français Société Générale, incluant ses filiales, ainsi que la totalité des parts de Sogécap dans La Marocaine Vie.
Selon les médias, les actionnaires de la SGMB sont appelés à se prononcer lors de cette AGE sur une résolution majeure, la modification de la dénomination sociale de la banque.
Ce changement portera sur l’article 2 des statuts, relatif au nom de la société, tandis que la forme juridique, le siège social et le capital resteront inchangés. Parallèlement, une autre résolution entérinera officiellement la nouvelle appellation de la banque, tandis qu’une dernière habilitera le porteur du procès-verbal à accomplir l’ensemble des démarches administratives et juridiques y afférentes.
En effet, le changement de nom de la SGMB dépasse le cadre d’une simple formalité. Il s’inscrit dans une reconfiguration profonde du secteur financier marocain, visant à renforcer la souveraineté économique, positionner Casablanca comme un hub bancaire continental, et consolider le paysage bancaire national sous une bannière pleinement marocaine. Cette évolution marque également une volonté assumée de tourner progressivement la page de l’héritage du groupe français Société Générale.
La dépendance historique au capital français -héritage du protectorat- a longtemps limité la marge de manœuvre stratégique des établissements financiers marocains. Le rachat de la SGMB, détenue par le groupe Société Générale depuis 1913, marque une rupture décisive avec cet héritage.
Cette transition s’inscrit dans le cadre plus large de la réforme du secteur bancaire, impulsée par la loi de 2014, qui a renforcé les dispositifs de supervision macro-prudentielle sous l’autorité de Bank Al-Maghrib.
Le Comité de coordination des risques systémiques, instauré par ce texte, a joué un rôle central dans l’approbation de cette opération, veillant à sa conformité avec les exigences de stabilité financière nationale.
En rachetant des filiales de banques européennes et en développant des solutions adaptées aux réalités africaines, les banques marocaines réduisent leur dépendance aux correspondants européens, ce qui permet de diminuer les coûts de transaction tout en renforçant leur autonomie financière.
D’ailleurs, le soft power bancaire marocain s’est considérablement renforcé grâce à l’expansion des banques nationales sur le continent africain. Cette dynamique s’explique par la présence affirmée d’acteurs majeurs tels qu’Attijariwafa bank, Bank of Africa (BMCE) et désormais Saham Bank, implantés dans une trentaine de pays, avec des positions stratégiques notamment au Sénégal et en Côte d’Ivoire. Cette implantation permet au Maroc d’exercer une influence économique directe, en appui aux entreprises marocaines et au développement local.
Effectivement, ces banques marocaines jouent un rôle clé dans le financement de projets structurants à travers le continent africain, notamment dans les domaines des énergies renouvelables, des infrastructures et des services.
Leur action contribue à la stabilité et au développement économique régional. Elles accompagnent également des multinationales occidentales opérant en Afrique, consolidant ainsi les partenariats économiques intercontinentaux.
Pour rappel, ce désengagement progressif des banques françaises au profit d’acteurs marocains ne se limite pas au territoire national.
Il s’observe également dans plusieurs pays africains, comme en témoigne, fin 2019, la reprise par la Banque Centrale Populaire des parts détenues par le groupe français BPCE au Cameroun, en République du Congo et à Madagascar.